Errances orientales - Introduction

par Elie Meuret et Gilles Courvoisier · 12.07.2023

Mars 2023, quelques mois avant les examens du bac de troisième année de gymnase, avec deux amis nous décidons de participer au concours « des voyages extraordinaires » proposé par la Fondation Lombard Odier. Au départ, l’idée de partir n’est qu’une petite pensée qui apparaît par bribes dans un coin de l’esprit, un désir enfantin d’ailleurs, la fuite : un rien. Sans consistance réelle, cette pensée légère est rapidement repoussée à l’arrière-plan de la conscience. Le gymnase, les cours, les rendus, les projets, le stress et les examens, petit à petit, elle disparaît. Toutefois, lentement et en arrière-fond, dans les coulisses et à mesure que le temps avance, cette petite pensée déploie ses racines qui finissent par s’implanter si solidement en nous que le départ n’est plus qu’une évidence. La vérité est là : il faut partir. Cela sonne comme un ordre, une voie que l’on se doit d’emprunter malgré le courage qu’elle demande. Au début, la destination n’importe que peu de chose ; il faut simplement partir pour découvrir, se découvrir. Aux confins de l’enfance qui s’achève définitivement avec l’obtention du baccalauréat marquant ainsi la première étape d’une vie d’adulte, le voyage apparaît peut-être comme une opportunité de se rapprocher un peu plus d’une maturité nouvelle ; une maturité autre que celle de la maturité fédérale : simple bout de papier. Assurément, le voyage nous ouvre à de nouveaux mondes, à des mystères ineffables que l’on cherche à saisir. Il est une opportunité de faire ses premiers pas dans ce qui serait le monde des grands. Alors, il faut choisir. Ce sera le Maroc. Riches d’autant d’histoires et de cultures que de représentations occidentales, ces lieux apparaissent instantanément
comme une sorte d’immense mosaïque composée d’images, d’odeurs et de saveurs. L’Orient et ses mystères. Les images et les sonorités nous viennent à la simple évocation de ce nom. Des souvenirs de lectures
flaubertiennes, des réminiscences d’un tableau de Delacroix ou de Jean Léon Gérôme. Une fois plongé dans l’orientalisme des artistes du XIXe siècles, impossible de s’en défaire, impossible d’oublier. En se projetant dans ce monde rêvé à travers la lecture et une attirance pour les récits et l’esthétique orientalistes, c’est déjà un premier voyage que nous avons entrepris ; un premier voyage qui invite inexorablement au second, le vrai, celui de la confrontation. Alors,il faut partir.

Une obligation, voilà ce qu’est le voyage et la confrontation qu’il implique puisqu’elle apparait comme nécessaire pour peut-être parvenir à effleurer ce mystère, cette attirance alors insaisissable. Lorsque les musées et les livres ne sont plus assez puissants, le voyage devient à la fois un besoin et le seul moyen de confronter nos représentations aux paysages ainsi qu’aux atmosphères desquelles elles sont nées. Nous voulions vivre cette contemplation, voir de plus près, voir mieux peut-être. Et puis, du onze juillet au treize août, nous sommes partis. Le projet est soudain devenu réel, défait de tous fantasmes. Voilà, « ça a commencé comme ça […] ». (Céline, Voyage au bout de la nuit, 1932).

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