Copenhague

par Mauranne Falise · 08.05.2019

De la neige en mai ?! Décidément, tout est possible à Copenhague. C'est cette drôle de surprise qui me tire du lit ce samedi matin et je décide d'en profiter pour me mettre à rédiger. La page blanche qui me fait face illustre assez bien mon inspiration du moment. Pourtant, les expériences ne manquent pas et l'idée me vient de comparer mon séjour danois à ces flocons surprises : aussi inattendu qu’unique !

J'ai assisté à un panel d'évènements différents: cours d'impro, de swing et de batchata, visionnage de films et débats, conférences et journées de trocs. C’est à la « Studenterhuset », un café étudiant qui accueille un très large éventail d'événements visant à engager les jeunes, que je passe de nombreuses soirées et fait de belles rencontres.

Les initiatives durables ne manquent pas à Copenhague et, dès les premiers jours, je fais la découverte d'une association qui attire mon attention. Foodsharing est une vrai Success story à l'américaine : l'association a commencé toute petite, avec une table et deux bénévoles et a maintenant trois évènements hebdomadaires qui attirent des centaines de participant-e-s. Je m'enregistre en tant que 261ème bénévole et me rend à l'évènement dans le quartier de Norrebrø. L'objectif central de l'association est de combattre le gaspillage alimentaire. Chacun de ses évènements consiste à récupérer les invendus de dizaines de boulangeries et supermarchés et de les redistribuer gratuitement.

Avec l'équipe de l'installation, on se retrouve 4h avant l'ouverture, une douzaine de personnes est nécessaire pour installer les tables, décharger le van et les différents vélos-cargo, trier les aliments trop abîmés et ranger le reste. Je reste bouche bée devant l'efficacité de tous les bénévoles : comme dans une fourmilière, chacun-e connaît son rôle et tout le monde l'exécute avec le sourire. À la fin, nous pouvons tous nous servir de légumes (maintenant bien rangés) et de pain frais de la veille. La visite de 200 chanceux plus tard et tous les restes alimentaires qui étaient destinés à l'incinération ont trouvé d'heureux estomacs ravis de les sauver. J'aime beaucoup cette simple structure qui répond à une vraie problématique en rendant service à la société. C'est une initiative très locale et entièrement bénévole, mais je n'ai aucune peine à imaginer qu'il serait facile de l'adapter pour l'adopter ailleurs. Des petites graines d'idées plantées et conservées précieusement pour plus tard peut-être les partager ou les réaliser.

Pendant que certaines personnes s'échinent à colmater les points faibles du système, d'autres ne sont tout simplement pas satisfaites. Et si on n’aime pas le système dans lequel on vit, pourquoi ne pas en créer un autre ? C'est un petit peu ce qui a donné naissance à Christiana, le fameux quartier « indépendant » ou « alternatif » de la ville. Dès qu’on y pénètre, un brusque changement d’atmosphère est palpable. D'ailleurs, la coupure est plus que physique puisque ce village fait de maisons créatives et de jardins collectifs est presque entièrement indépendant du Danemark, même sur le plan juridique. La survie de cet espace malgré de nombreux affrontements avec le gouvernement est une prouesse impressionnante et, si je devine que le système est probablement imparfait, j'admire la résilience des résident-e-s à réaliser leur vision. Pendant notre balade, nous rencontrons un échantillon du millier d'habitants et, parmi les nomades, les artistes et les musicien-ne-s, nous nous retrouvons nez à nez avec des groupes d'enfants qui profitent des derniers rayons de soleil. Quelle enfance ce doit être de grandir dans un tel environnement ! Je me demande quel genre d'adulte ces milieux alternatifs créent.

Des rebelles et des gens qui se battent contre le système, j'en rencontre également lors d'un débat après le visionnage du chapitre sur la démocratie du fameux film Demain de Cyril Dion. Des activistes du groupe Extinction Rebellion sont venus prôner la désobéissance civile pacifique pour revendiquer l'état d'urgence climatique auprès des gouvernements. Ils expliquent que c'est une façon de forcer la main sur une démocratie trop indirecte, qui malheureusement peut avoir tendance à prendre des décisions qui bénéficient plus les élus que le peuple. C'est au milieu de ces débats animés entre gens passionnés que je me sens bien. Je ne sais pas s’il est encore temps de faire machine arrière, ou même de freiner la catastrophe qui se profile, mais je trouve du réconfort dans la certitude qu'au moins,  j'aurais essayé de mon mieux, que je me serais battue du bon côté de l'Histoire.

Copenhague me replonge dans le présent. L'appréciation du moment sans appréhension du futur ou regret du passé. Les reflets du soleil sur l'eau, le défilé ininterrompu de vélos et tout l'art de vivre de façon Hyggelig font des miracles pour calmer mon flot d'habitude ininterrompu de pensées. Je me sens libre et vivante, simplement heureuse d'avoir la chance de profiter de cette aventure qui continue.

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