
Je tourne autour
Le soleil aventure, sans se presser, quelques rayons et se lève plus paresseusement que moi. Il fait bleu.
par Melchior Best · 27.09.2016
L'automne avance depuis quatre jours, moi depuis bientôt trois semaines. Aujourd'hui, journée de marche pour atteindre shōryūji le 36ème temple des 88 que compte le pèlerinage.
Encore quatre heures de route le long de l'océan pacifique, face au fin fil de l'horizon, avant d'atteindre la plage où je planterai ma tente ce soir.
C'est après la première semaine de marche que j'ai enfin rejoins la mer en compagnie de Todd, compagnon de route généreux et bon vivant.
Il vient de Londres, est 5ème ceinture noire de kyokushinkai karaté et peut briser 5 battes de baseball d'un seul coup de pieds mais détale aussi vite ( voir plus vite ) que moi à la vue d'une araignée (grosse ou petite…surtout petite dans la région en fait).
Durant cette première semaine, le chemin a alterné entre routes goudronnées au milieu des champs et forêts en basse montage (quelques centaines de mètres de dénivelé seulement) au sommet desquelles se trouvaient généralement les temples. Les forêts sont habitées de petites statues aux yeux fermés comme des promesses de repos, que la caresse du temps a habillé d'un manteau de mousse.
Elles sont les balises silencieuses, au même titre que les hérons et les cigognes dans les champs en pleines, du chemin à suivre qui nous a mené à la côte Nord-Est du shikoku.
Les jours passent, on suit la mer, et passons nos nuits sur les plages où je glane de petits morceaux d'océan qui alourdissent mes poches mais apporte tout de même leur pesant de légèreté à la marche. Corails, cailloux, coquillages...
Cette légèreté, j'essaie de la saisir dans mes carnets. Une écrite et un dessin léger, comme mes pas sur le sentier.
Après une semaine et demie de marche ensemble, Todd et moi nous séparons. J'atteins seul le sud-ouest de l'île et avance progressivement pour rejoindre Kongōfukuji, le temple numéros 38, à l'extrême pointe sud du Shikoku. L'endroit est réputé magnifique et chaque pèlerin sur le chemin n'a que ce nom à la bouche. Là-bas, j'aimerai trouver un bateau pour aller rencontrer les baleines.
La route est encore longue et faite d'inconnu, les seules choses certaines sont le prochain pas et que demain il faudra reprendre le chemin. Mon abri, le prochain pas.
Je rumine ce soir, en cheminant vers mon point de campement, une phrase de Walt Whitman
" Les poètes du cosmos avancent jusqu'aux premiers principe. "
Je marche pour me faire commençant et à chaque pas commencer.