Veliko Tarnovo et Bucarest

par Lou Golaz et Max Shore · 12.09.2016

A Veliko Tarnovo, l'ancienne capitale bulgare, nous sommes allés à la rencontre de musiciens des rues et avons joué avec eux. Cependant, l'accordéoniste et le clarinettiste qui ont partagé ce moment de musique improvisé avec nous étaient bulgares et non Rroms.

Une locale avec qui nous avons discuté nous a éclairé sur la question: "en Bulgarie, les familles Rroms ne cherchent pas à se mélanger avec nous. On ne sait pas très bien sur qui mettre la faute, si c'est nous qui les rejetons ou si ils s'excluent par eux-mêmes. Probablement les deux." 

Pourtant, le quartier Rrom a Veliko Tarnovo est plutôt paisible, les familles y sont installées depuis plusieurs générations et les aides sociales suffisent à leur assurer une vie décente, bien qu'à l'écart de la société. 

Ce n'est pas le cas à Bucarest. Dans la capitale, la réalité Rrom est beaucoup plus sombre: mendicité, prostitution, drogue bon marché et vandalisme. Ils sont connus uniquement pour ça, étant donné que les Rroms intégrés à la société ne veulent plus se reconnaître comme tels, par honte ou par peur du jugement.

Nous avons fait du stop jusqu'à Roussé, petite ville à la frontière bulgaro-roumaine. Le lendemain, nous avons franchis la frontière à pied, à la queue leu leu entre les voitures et les camions, nos instruments à la main. Après avoir traversé le Danube, un camion nous a mené jusqu'à Bucarest, la capitale roumaine aux allures de mégapole, avec ses vastes rues et boulevards et ses immenses bâtiments qui rappellent la période communiste.

Il fait étouffant. Les mendiants mendient, les chiens errants errent, les sans-abris dorment sur des bouts de carton ou des bancs au milieu de l'après-midi. Au crépuscule, les terrasses sont bondées et la vie pullule, force invisible qui fait battre le cœur de la ville.

Nous retrouvons Simona et Serban, qui s'occupent de la programmation et des shootings du balkanik festival. "I grew up with that music-m'explique Serban- it is traditional romanian songs... But we all know that it is the gypsies who plays it the best ! That's why we love them!" Cette relation amour-haine est présente chez beaucoup de Roumains: "les Rroms, ce sont des bons à rien, mais quand ils jouent, ils vous arrachent des larmes."

Durant 3 jours, nous sommes baignés dans une atmosphère détendue et excitée à la fois, entre concerts et stands d'artisanat roumain. Ici, les locaux, les touristes, les Rroms, les musiciens et les artistes forment une joyeuse foule qui danse et rit dans des tourbillons de tissus à fleurs, de fumée de cigarette et d'épaules dénudées. 

Hier, le festival battait son plein pour la dernière soirée. La foule s'unifie lorsque le chanteur des Antwert gipsy ska orchestra s'écrie: "Rroms, Gadje, we are all human, we are all the same!" 

Pendant le concert des tarafs de haidouks, je danse avec un groupe de jeune Rroms, la cigarette à la bouche, survêt Adidas et casquette posée sur la tête. Ils me font tourner, le plus jeune, 8 ou 9 ans, joint ses mains pour que je l'embrasse, je refuse. Ils ont des regards d'hommes du haut de leur 13, 14 ans. Ils se marient à ces âges. Je remets en place les mains désobligeantes au début et quand ils me voient si ferme, ils acceptent et nous tournons tous ensemble dans le respect et la bonne humeur.

Vers 23h, les tarafs descendent de la scène pour terminer leur concert dans la foule, au rythme effréné des cuivres et des percussions. C'est la folie dans le public, et lorsque les musiciens se retirent, on tape encore des mains, on chante et on danse car personne n'a envie que ça s'arrête !

Quand nous nous réveillons ce matin, Bucarest est déjà active depuis des heures. Dans quelques jours, nous nous éloignerons de cette géante, pour atteindre la Transylvanie et ses forêts paisibles.

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