Chez les Gabor

par Lou Golaz et Max Shore · 14.10.2016

C'est par le biais de Chuck que nous avons débarqué dans la famille Gabor. Cet américain développe un projet de partage des cultures nommé "Tzigania" depuis peu, dans le but de faire interagir Rroms et Gadjés.

Après avoir fait de courtes haltes à Budpest, Oradea et Cluj, nous arrivons donc à Valenii, petit village à quelques bornes de Targu Mures. Nous sommes heureux de retrouver cette partie de la Roumanie, avec ses églises en bois, ses nids de cigogne, ses puits d'eau profonds et ses calèches. Quand nous entrons pour la première fois, timides, dans la cuisine des Gabor, nous ne savions pas que nous allions y rester une semaine entière. Très vite, nous apprenons à connaître cette joyeuse famille. Une mère coquette et souriante, un père travailleur à la moustache lissée, une grand-mère aux longues tresses grises, une fille déjà mère de deux petites terreurs à croquer, une autre tout sourire désarmant entre enfance et vie adulte, et un fils qui rentre de l'école avec sa casquette "yo" posée de façon étudiée sur sa tête. 

Du haut de ses 14 ans, Margaret (mais on dit Perty) parle couramment le Rromani, le hongrois, le roumain et l'anglais. C'est elle, avec sa grande sœur Klara, qui permet le lien (par la langue) entre les invités et la famille. C'est principalement elle qui nous explique: nous sommes ici chez les Rroms les plus traditionnels, ceux qui descendent de la plus haute caste. Ils ne vivent pas dans la précarité mais la jeune fille fait face à d'autres problèmes: "Ma famille ne croit pas à l'amour, ni à l'amitié garçon-fille. Je ne suis pas amoureuse de ce type. Mais je vais me marier avec lui cet hiver. Il est bête... Il ne m'attire pas du tout. Oh et je ne vais plus à l'école. Mes parents ont peur que je me révolte et que je devienne comme ma sœur, une rebelle qui a divorcé deux fois à 25 ans... j'apprends un peu l'allemand sur internet quand j'ai le courage. M'évader ? Voyager ? Et puis quoi encore ? Je ne vais pas foutre la honte à toute ma famille ! Et puis mon père me retrouverait."

Si ce n'était pour la télévision qui beugle dans un coin, on se serait cru dans un autre temps... Mais au fond, qui sommes-nous pour juger de ces traditions si puissantes ? 

J'ai pu comprendre la situation un peu plus profondément quand, le lendemain, une classe Suisse est venue poser quelques questions à la famille. Il se trouve que Perty m'avait habillée de la jupe traditionnelle et, comme on aime plaisanter, j'ai pris place entre elle et Klara comme leur sœur. J'ai joué mon rôle à la perfection, je crois, et peut être un peu trop car en répondant aux questions je me suis sentie presque mal. Non, à 19 ans, je ne veux pas être mariée et avoir un enfant ! On a bien ri... Il n'empêche qu'enlever le tissus de ma tête et la longue jupe si lourde m'a bien soulagée. La douche froide et les toilettes dehors nous ont déjà enlevé un peu de notre confort habituel... Mais la chaleureuse atmosphère familiale nous a fait prolonger notre séjour chez les Gabors. Être immergés dans leur quotidien et s'acclimater à la vie de village nous a propulsé plus loin dans la profondeur de notre voyage.

Photo 1: La famille

Photo 2: 4 générations de femmes et la télé

Photo 3: Vue depuis la terrasse

Photo 4: Max, Rito et Gabi

Photo 5: Le village de Valeni

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